Le 18 septembre prochain, les électeurs écossais de plus de 16 ans seront amenés à se prononcer en faveur ou contre l’indépendance de l’Écosse au cours d’un référendum historique.
À la demande d’Alex Salmond, premier ministre d’Écosse et leader du Scottish National Party (SNP), l’Angleterre a accepté la tenue de ce vote par la signature des Accords d’Édimbourg en 2012. Si une victoire indépendantiste venait à être plébiscitée, le Traité qui réunit les Parlements anglais et écossais sous la gouvernance du Parlement de la Grande-Bretagne, l’Union with England Act (1707), viendrait à être abrogé.
Histoire d’une culture de différenciations
L’Histoire de l’Écosse est marquée par une forte volonté d’indépendance. Alors il est vrai que l’Écosse possède ses trésors nationaux. Tout amateur de whisky ne saurait le nier.
À titre d’exemples la musique écossaise et ses cornemuseurs couverts à la taille de kilts traditionnels à tartans rouges et verts sous lesquels, paraît-il, les hommes sont dévêtus ; un championnat de football et une équipe de rugby qui lui est propre ; un système monétaire autorisant l’impression de billet The Royal Bank of Scotland ; et un des plus vieux drapeaux du monde représentant la croix blanche de Saint André sur fond azur, étendard dont la légende conte qu’il fut dressé au IXe siècle lors d’une bataille contre les Angles. Déjà à l’époque.. Autant de points de démarcations culturelles qui tendent, pour les partisans de l’indépendance, à légitimer ce référendum de souveraineté.
Le Scotland Act et l’autonomie de l’Écosse
Depuis 1999, l’Écosse a obtenu le droit de refonder son Parlement. En ce sens, elle peut désormais constituer un gouvernement et régir ses institutions tout en restant en adéquation avec les principes de souveraineté britannique. A l’origine de cette autonomie, un référendum de dévolution en 1997 donnant lieu à la signature du Scotland Act le 2 novembre 1998 par la Reine Élisabeth II.
Par cet accord, est allégué à l’Écosse le droit de légiférer en son sein. Lui sont dévolus les pouvoirs domestiques tels que la santé, l’environnement, l’agriculture et l’éducation. En revanche, le gouvernement écossais n’a aucune emprise sur le système fiscal en place sur son territoire, sur son administration et sur la défense et la sécurité de ses frontières, entièrement contrôlées par l’Angleterre.
Le parti qui obtient la majorité de sièges dans cette assemblée peut ainsi former son gouvernement. En 2007 le premier gouvernement à majorité indépendantiste est formé par Alex Samlond, puis est conforté en 2011 dans une élection où il obtiendra une majorité absolue de sièges (69 sur 129).
Qu’en disent les sondages ?
Si la récente victoire des indépendantistes UKIP aux élections européennes a pu favoriser un regain d’intérêt pour ce référendum, les nouvelles générations, pro-européennes, se sont désintéressées de ces revendications souverainistes contre la couronne anglaise, si bien qu’aujourd’hui les sondages créditent la victoire de l’Union et de la campagne du Better Together.
Une évolution est toutefois constatée. Ainsi, en décembre 2011, seuls 38 % des électeurs écossais étaient favorables à une indépendance (Sources : Huffington Post). En janvier 2012, un sondage réalisé par The Guardian affichait un parallèle entre les opinions publiques Anglaises et Écossaises. Lorsque 43 % des électeurs britanniques se prononçaient comme favorable à la Yes Campaign, 40 % des Écossais, eux, affirmaient qu’ils voteraient en faveur du « oui » à l’indépendance.
En octobre 2012 les électeurs écossais sondés par le British Market Research Bureau pour le quotidien de Glasgow, The Herald, rapportaient que seuls 28 % de la population serait favorable à l’indépendance.
Depuis janvier 2014 les intentions de vote en faveur du « oui » à l’indépendance se stabilisent autour de 40 % et si les sondages apparaissent parfois fluctuants, c’est toujours le « non » qui l’emporte. En Écosse, ces débats déchaînent les passions, les enjeux d’une telle décision sont symboliquement déterminants pour le peuple.
Pour quelle Écosse ?
Aussi, pourra-t-on toujours considérer la Reine d’Angleterre comme souveraine ? Les indépendantistes tiennent à rassurer les Écossais. Queen Élisabeth the second sera toujours leur reine.
Ils espèrent aussi pouvoir garder la livre sterling comme monnaie afin de ne pas plomber la future économie écossaise. Cette économie s’appuierait sur l’exploitation des hydrocarbures volatils (97 % des réserves pétrolières détenues par l’Angleterre et 58 % des ressources gazières) située dans les eaux territoriales écossaises en mer du Nord.
De tradition socialiste, les dotations financières qui en résulteraient permettraient au gouvernement écossais de financer ses mesures de politiques sociales, créant de ce fait une dépendance envers cette exploitation puisqu’elle représenterait 20 % de son PIB.
Politiquement, elle pourra aussi négocier la démilitarisation de son territoire et le retrait des sous-marins nucléaires anglais en mer d’Écosse. Toutefois, les volontés souveraines s’opposeront rapidement concernant la défense de ce nouveau territoire assurée jusque lors par l’Angleterre.
De nature pacifique, les Écossais pourront riposter en interdisant les manoeuvres anglaises en mer du Nord.
Une Écosse indépendante vue par l’Europe
Il ne faut pas oublier l’influence internationale de l’Angleterre, et le gouvernement écossais pourrait s’en mordre les doigts, puisque la Grande-Bretagne est à la fois le quatrième pays à accueillir les Investissements Directs à l’Étranger (IDE), mais aussi une puissance économique, membre de l’Union Européenne, plus grand marché commercial international qui représente prêt de 20 % du PIB mondial.
Cette même Union Européenne qui reste partagée sur cette volonté d’indépendance. Comme le souligne le président de la Commission européenne, José-Manuel Barroso, il sera « difficile, voire impossible pour l’Écosse » d’intégrer l’Union européenne. En effet, toute adhésion requiert l’aval de tous ces membres. L’Angleterre pourrait se prononcer contre.
Perdre l’Écosse, reviendrait pour le Royaume-Uni à perdre en stature, et se séparer de l’Angleterre entraînerait pour l’Écosse un isolement sur la scène internationale. De plus, cette décision pourrait entraîner un effet boule de neige dans les provinces britanniques. Les communautés indépendantistes des Pays de Galles et l’Irlande du Nord ayant déjà fait entendre leurs revendications sécessionnistes.
L’Espagne aussi est préoccupée par ce résultat. Subdivisée en Comunidades Autónomas, elle doit gérer des volontés indépendantistes catalanes de moins en moins contenues.
D’ores et déjà, David Bowie et J.K. Rowling, auteur de la saga Harry Potter, se sont prononcés contre.
Alex Salmond nous donne rendez-vous en septembre prochain pour la tenue de ce référendum que les deux gouvernements s’engageront à respecter, en tant que décision du peuple écossais, et ce quelque soit son résultat.