Brexit : « perfide Albion »

REUTERS/Francois Lenoir
REUTERS/François Lenoir

Oui vous ne vous y trompez pas nous parlerons bien ici du fameux Brexit qui depuis des semaines anime l’ensemble des discussions des spécialistes de l’Union Européenne et plus globalement, fait vivre les conversations de café. La “perfide Albion” nous menace de mettre en branle “l’idéal” européen que nos pères ont forgé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Pire encore, elle souhaite rompre avec le destin commun vers lequel nous nous destinions, fondé lui-même sur une littérature abondante : Paris, Rome, Maastricht, Amsterdam, Nice, Lisbonne. Tant de traités tous plus fédérateurs les uns que les autres.

Mais le United Kingdom nous répond à cela : « Que nenni ! », traduit « Better Off Out » ou simplement « Leave EU« . Point final.

Alors que la très prolixe Campaign For An Independent Britain (fondée en 1969, soit 4 ans avant l’adhésion de la Grande Bretagne à l’Union Européenne, c’est dire) nous conte les « 7 reasons why we should leave EU » et prend, de fait, une importance certaine dans ce débat, nous autres, fervents européens, attendons pantois le vote du 23 juin prochain en espérant du fond de notre coeur un sursaut d’européanisme de nos voisins insulaires.

Tant d’ironie pour souligner que ne doit être occultée la responsabilité du Prime Minister, David Cameron, dans cette campagne en faveur de la sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne.

À l’initiative de ce référendum, ce dernier est trop souvent excusé d’avoir organisé ce vote populiste, pressé d’un côté par son électorat, et de l’autre par les voix dissonantes des partis eurosceptiques, avec, en chef de file, le trop fameux UKIP.

Visiblement acculé par l’Europe pour cette décision séparatiste, David Cameron aura fait volte face très rapidement, se pourfendant maintenant d’être le grand partisan du « Stay in » à des fins de racheter une position dans la communauté européenne qu’auparavant, personne n’avait contesté…

Un fin stratège donc, qui, pour un Oui ou pour un Non, saura sortir vainqueur d’un vote qu’il a lui-même provoqué. En ce sens, si le Royaume-Uni était amené à sortir de l’UE, David Cameron resterait à jamais l’instigateur d’un tel choix. Un comble pour un État qui, il y a peu, craignait l’indépendance de l’Écosse.

À l’inverse, si le UK venait à rester dans l’UE, ses adversaires ne pourraient que regretter une occasion manquée et « tirer les enseignements » d’une campagne à laquelle ils n’auraient su mobiliser l’électorat europhobe.

Une aubaine pour Cameron qui, avec un coup d’avance, saura rappeler à l’Union Européenne son engagement en faveur du Oui. Un comportement qui trouve son paroxysme dans l’envoi de mailing à l’ensemble des ressortissants anglais pour les appeler au vote, et si possible au vote favorable – pour preuve d’ailleurs pléthore d’arguments défenseurs du Stay in sur le site dédié (ici) – un bon communiquant finalement.

Mais là est le réel enseignement du Brexit, et ce, quel qu’en soit le résultat, car d’avance, Sir Cameron aura su renégocier de nouveaux avantages pour la Great Britain en obtenant des 28 membres de l’UE un compromis renouvelant son « pacte» avec l’Europe.

Système du «carton rouge» s’apparentant à un droit de veto de groupements de parlements nationaux contre toute législation européenne ; sortie du programme de sauvetage de l’euro – alors que le Royaume-Uni n’utilise pas cette devise cette suggestion est somme toute logique, mais dénote un manque de solidarité entre les États ; reconnaissance de plusieurs monnaies courantes en Europe et la fin des discriminations envers les États non-utilisateurs de l’Euro ; etc…

Des mesures à sens unique visant finalement à faire avaler aux européens des accords pour que moins d’Europe ne s’applique au Royaume-Uni.

N’oublions pas toutefois que dans ce corpus de mesures « a minima » obtenues par le résident du 10 Downing Street, l’une d’entre elles révèle la tournure que les débats autour du Brexit ont pris en Angleterre : la « restriction sur les aides sociales aux migrants ».

Ce point d’ailleurs nous apprend beaucoup plus sur nous-même que nous ne voudrions le reconnaître. Trop d’aides sociales destinées aux résidents européens non anglais, hausse de l’immigration vue comme non-contrôlée, crainte d’accueillir des réfugiés sur leur territoire… Même la fin du règne de la Reine d’Angleterre est en jeu. Ne reconnaissons-nous pas là un certain discours véhiculé en France parmi les masses par des personnalités politiques liées aux « extrêmes » ? Ces propos ne sont-ils pas intimement liés au rejet de l’autre et à une crainte de perte de souveraineté des populations ressortissantes ?

Que nous apprend donc ce référendum si ce n’est que le peuple anglais illustre, à sa manière, un repli identitaire que nous observons dans de nombreux pays européens.

Et à ce titre, que dire du silence de la Reine, qui, en fêtant son anniversaire ce jeudi 21 avril, est devenu la doyenne des monarques de notre planète. Que dire d’une monarque qui se doit d’être le guide de son peuple dans des temps que nous voyons souvent sombres ? Des crises, pourtant, à son âge, Queen Elisabeth en à vu passer, non ?

Thomas Alves-Chaintreau

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